Euthanasie : un soutien apporté par le Cese

Ce mardi 10 Avril, le Conseil économique social et environnemental (Cese) examine un texte proposant la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté.

La « troisième assemblée de la République », qui s’était auto saisie après avoir reçu une pétition de plus de 200 000 signatures demandant la légalisation d’une aide active à mourir, s’apprête en effet à se prononcer explicitement en faveur de la légalisation de l’euthanasie et du suicide assisté.

Concrètement, si le projet de texte du Cese rejoint le constat, maintes fois établi, de l’existence d’un « mal mourir » en France et appelle à un accroissement et à une meilleure répartition de l’offre de soins palliatifs dans le pays (11 « préconisations » sur 14), il suggère aussi la possibilité d’instaurer pour un patient une « sédation profonde explicitement létale ».

Une manière d’« élargir le champ des possibles » en ce qui concerne les « derniers soins », « dans le cas où les soins palliatifs n’apportent pas de réponse satisfaisante ».

Voie ouverte au suicide assisté

L’accès à ce que le Cese qualifie de « nouveau droit » est encadré par trois garde-fous : le demandeur devra être une personne majeure pouvant justifier d’une « souffrance physique ou psychique inapaisable » et d’une « affection incurable en phase avancée, voire terminale ». Qui administrera le produit ? Un médecin ou la personne elle-même, indique le rapport, ouvrant ainsi la voie au suicide assisté.

Les auteurs ajoutent que l’acte de décès d’une personne euthanasiée indiquerait que celle-ci est décédée de « mort naturelle ». Les médecins pourraient faire valoir une clause de conscience pour ne pas administrer la potion létale. Enfin, une « instance de contrôle » serait créée pour transmettre un éventuel dossier litigieux à la justice. Un modèle de contrôle a posteriori inspiré de celui mis en place en Belgique, où existe une Commission fédérale de contrôle et d’évaluation de l’euthanasie.

Les « divergences » exprimés par des membres de la commission

Au cours des cinq mois d’élaboration du texte, l’expression « sédation profonde explicitement létale » a fait l’objet de vives discussions parmi les 30 membres de la commission temporaire sur la fin de vie, placée sous la houlette du rapporteur Pierre-Antoine Gailly, ancien président de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris. Certains membres, dont des représentants de l’Union nationale des associations familiales et de la CFTC, ont réclamé l’introduction dans le texte d’un passage faisant état de leurs « divergences ».

Pierre-Antoine Gailly, qui a piloté la quarantaine d’auditions auquel le groupe a procédé, défend l’avis élaboré à l’issue de débats « intenses et sérieux ». Il fustige en particulier « l’hypocrisie » de la mise en œuvre de la sédation profonde et continue jusqu’au décès, un procédé qui permet depuis la loi Claeys-Leonetti de 2016 d’endormir artificiellement un patient en toute fin de vie pour apaiser les souffrances de l’agonie. « Aujourd’hui, un certain nombre de soignants hésitent à utiliser cette méthode car ils ont peur d’être accusés d’euthanasie. Si nous permettons l’euthanasie, nous libérerons les professionnels des soins palliatifs de cette inquiétude », insiste-t-il.

Une façon d’aborder la question qui attise les critiques de l’immense majorité des professionnels du secteur. « Parler de sédation profonde explicitement létale ne veut strictement rien dire, avertit Marie-Dominique Trébuchet, vice-présidente de la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs (Sfap), qui représente 10 000 soignants et 6 000 professionnels du secteur. Lorsque l’on emploie une sédation, on le fait pour endormir une personne, et non pour la tuer. Avec cette notion, le Cese introduit une confusion en ôtant toute possibilité de distinguer ce qui relève de l’euthanasie et ce qui relève de la sédation. »

« Qui peut prétendre qu’en faisant la sédation explicitement létale, on va changer quoique ce soit au mal mourir en France ? », interroge le docteur Bernard Devalois, chef du service de soins palliatifs à Pontoise et directeur du Centre de recherche « Bientraitance et fin de vie ». « Cette préconisation est totalement hors sol : cela ne peut qu’altérer la confiance que les patients et leurs familles nous portent. »

Source : La Croix, 10/04/2018, Loup Besmond de Senneville

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